• Pendant ce temps là, à Belfast aussi... 

     

    InstantanéL'Autre - 2

     

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    Kepler-90

    16 ans après la fin de l'Autre

    Le taxi déposa Stéphan au bout de la route, près de la plage. Il paya sa course puis prit sa valise et descendit lentement vers la maison où il avait habité une grande partie de son enfance et adolescence. Un sourire teinté de regret arrondissait ses lèvres. Il savait que c’était la dernière fois qu’il venait ici.

    Kepler-90

    Il frappa à la porte et, comme d’habitude, ce fut Gabby qui lui ouvrit. Elle eut un grand sourire en le voyant et elle l’enlaça vivement.

    Kepler-90

    - Stéphan, mon chéri. Comme je suis contente de ta venue.

    - Moi aussi, Gabby. Cela me fait du bien de me poser quelques jours chez vous.

    - Entre donc et va poser tes affaires dans ta chambre. Tout est resté à sa place.  

    Il sourit et l’embrassa sur la joue puis partit en direction de sa chambre. En l’ouvrant, tout le passé lui revint à la figure. Tout ce temps passé à contempler ces affiches de films, à rêver à ce moment où lui aussi serait un capitaine de vaisseau, un explorateur de l’espace. Finalement, il n’en était plus si loin. Il posa sa valise à côté du lit, puis s’assit un moment. Il savourait le plaisir de retrouver son cocon, son refuge pendant toutes ces années compliquées. Son enfance c’était ici, à Scarborough, et non pas à Newborn. Il n’en avait plus aucun souvenir, ni de la ville, ni de ses parents. Et ce n’était sûrement pas plus mal, vu de ce qu’il savait des Bassington et de ce qui avait œuvré à Newborn. Sa famille, c’était celle qui l’avait élevé, pas ceux qui l’avaient conçu. Il avait été aimé et c’est tout ce qui importait pour lui. Cela lui avait assuré une stabilité qui lui avait permis d’arriver là où il en était maintenant.

    Kepler-90

     Il eut de nouveau un sourire triste. Tout cela, cet environnement, il allait le quitter bientôt pour ne jamais y revenir. Bien évidemment, cela le peinait mais la promesse de ce qui l’attendait était encore plus belle. Il ne voulait pas laisser passer cette chance. Il avait travaillé trop dur pour ne pas la saisir.

    Il se releva et entreprit de ranger ses affaires dans la commode. Puis une fois fini, il plaça sa valise sous le lit et rejoignit Gabby au salon. Celle-ci était en penchée sur un ouvrage en point de croix, un loisir qu’elle pratiquait depuis qu’il la connaissait. Elle releva la tête vers lui puis se décala sur le canapé pour qu’il s’assoit près d’elle.

    - Tu es bien installé ? Est-ce que tu as besoin de quelque chose ?

    - Non, merci. C’est très bien… Raphaël n’est pas là ?

    - Non, pas encore. Il aide un voisin dans l’accordement de son piano.

    - Ah, évidemment. Il ne change pas là-dessus, mon grand frère.

    - Oui. La musique, c’est toute sa vie. Et il aime bien rendre service.

    Kepler-90

    Stéphan hocha la tête puis s’installa sur le canapé à côté de Gabby. Il parcourut le salon du regard. Rien n’avait vraiment changé depuis son départ et il trouvait cela rassurant de revoir toutes ces petites choses qui avaient fait parti de son quotidien étant enfant. Son regard s’attarda sur le portrait d’Emma qui était suspendu dans un coin du mur et il eut une grimace. Sa sœur défunte. Il lui devait la vie. Si elle n’était pas morte, il n’aurait jamais été conçu. C’était toujours aussi déroutant et dérangeant. Emma, le génie de la famille et une jeune femme martyrisée. Raphaël lui avait fait lire son journal intime une fois qu’il avait été assez grand pour supporter certains évènements racontés dans ce carnet. Il savait donc ce qu’il s’était passé, de tout ce qui avait découlé de la souffrance d’Emma.  Il en était fort navré, mais pour lui elle restait et resterait toujours une étrangère. Alors que pour Raphaël, c’était sa sœur jumelle qu’il pleurerait toute sa vie.

    Kepler-90

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    Et lui, Stéphan, allait causer encore un peu plus de chagrin à son grand frère.

    Gabby intercepta son regard sur le portrait d’Emma et eu une brève moue chagrinée.

    - Ah. Emma… Il n’y a pas une semaine où Raph ne m’en parle pas. Il aimerait retourner sur l’île de Mainland et récupérer ses cendres.

    - Je pensais qu’il l’avait fait, pourtant.

    - Non… Certains… souvenirs ont la peau dure…

    - Ho !

    Kepler-90

    Stéphan savait de qui Gabby parlait sans en prononcer le nom. Une autre qui s’était toujours glissée entre elle et Raphaël malgré tout l’amour qu’ils se portaient, une autre pour lequel elle ne voulait pas lutter.

    Elle se racla la gorge puis se remit à l’ouvrage, une manière de chasser le souvenir désagréable. Un bref tintement se fit soudain entendre. Stéphan ouvrit son portable et sourit au message qui venait d’apparaître. Il répondit rapidement, une expression tendre sur le visage. Il croisa le regard de Gabby, qui n’en avait pas perdu une miette, et il rougit.

    Kepler-90

    - Il y a quelque chose que tu devrais nous dire, Stéphan ?

    - Heu… Oui, plus ou moins. Mais je vais attendre que Raphaël soit là pour vous en parler.

    Il lui sourit puis s’installa devant la télévision pour regarder un feuilleton australien. Depuis la fin de la Crise, il y a de cela une dizaine d’années, la vie était revenue à peu près à la normale, tant au niveau de la vie quotidienne que dans les loisirs avec son pendant, les séries débiles à la télévision. Cela fit ricaner Stéphan intérieurement. Il n’y avait qu’ici qu’il pouvait se permettre de prendre le temps de regarder la télévision. Au Centre Spatial, le travail et les études ne lui laissaient guère de loisirs. Mais c’était également le jeu. Il savait pourquoi il s’était engagé là-dedans et ce que cela allait entraîner pour lui.

    Une heure passa ainsi tranquillement. Puis, il aida Gabby à dresser la table et à préparer le dîner, comme il avait l’habitude étant plus jeune. Ils se sourirent tous les deux, ravis de retrouver leur ancienne complicité.

    Enfin, Raphaël rentra à la maison et il eut une exclamation joyeuse en voyant son jeune frère.

    - Stéphan ! Je ne pensais pas que tu arriverais aujourd’hui !

    - Et si ! J’ai pu finir plus rapidement que je ne le pensais et j’ai pris l’avion très tôt ce matin.

    Kepler-90

    Stéphan enlaça son frère qui lui rendit son étreinte avec tendresse. Enfin, après quelques échanges convenus et banalités, Gabby leur signifia de passer à table et ils commencèrent le dîner.

    Kepler-90

     

    Ce fut au début des paroles légères, de part et d’autre, la météo, les repas de la cantine, les voisins, tout ce qui avait trait à la vie quotidienne et qui ne portait pas à conséquence. Au bout d’un moment, quand la conversation commença à mollir un peu, Stéphan se jeta à l’eau. Il prit une gorgée de vin et se racla la gorge. Gabby et Raphaël se turent et le regardèrent, attentifs.

    Kepler-90

    - En fait, si je suis revenu ici, c’est pour vous annoncer quelque chose… Vous savez que j’ai eu tous mes diplômes dans l’aéronautique et que j’ai fait mes preuves en tant que co-pilote pour la navette de liaison avec la station spatiale Australo-européenne.

    Ils hochèrent la tête de concert.

    - On vient de me proposer un autre poste de co-pilote, pour une navette spatiale qui fera le voyage jusqu’à la lune...

    Kepler-90

    - Ha bravo, mon frère.

    Raphaël voulut se lever pour le féliciter mais Stéphan l’arrêta net et continua à parler.

    - … pour la lune de Jupiter, Europe.

    Cela les rendit muets. Ils savaient très bien ce qui était en train de se construire, là-bas. Et, même si la technologie spatiale avait eu un progrès fulgurant ces dernières années, le voyage était quand même de trois mois pour arriver jusqu’à Jupiter. Ce fut Raphaël qui brisa le silence quelque peu tendu.

    - C’est… C’est une nouvelle assez déstabilisante. Alors, c’est loin certes, mais heureusement, les communications interstellaires existent. Même si cela sera quelque peu décalé.

    - … C’est là où je voulais en venir, Raphaël… Gabby… Vous savez très bien ce qui est en train de se construire là-bas, près de Jupiter, en orbite autour d’Europe… Un trou de ver. Un trou de ver qui va nous emmener directement dans le système de Kepler-90, où se trouve une planète propice à la vie. Un programme est déjà prévu pour étudier de plus près l’écosystème planétaire. Je fais parti de l’expédition.

    Kepler-90

    Gabby eut un cri étranglé et Raphaël pinça fortement les lèvres. Stéphan savait que cette annonce passerait difficilement auprès d’eux. Il avait eu le bonheur d’être élevé par eux, de faire partie d’une famille aimante et chaleureuse et d’avoir été soutenu dans tout ses choix de vie.  Il les aimait, il les aimerait toujours. Mais, cela ne suffisait pas à le faire rester sur Terre. Ce qui l’attendait là-bas, dans les tréfonds de l’espace, c’étaient ses rêves les plus fous qui se réalisaient. Il ne pouvait pas ne pas y aller.

    Ce fut Raphaël en premier qui reprit la parole, pendant que Gabby, discrètement, s’essuyait les yeux.

    - Cela veut donc dire que tu ne reviendras pas sur Terre… avant un long moment…

    - Oui. C’est un travail qui va prendre des années et des années. Nous devons construire la station, étudier l’écosystème planétaire, explorer le système alentour. Oui, cela va prendre beaucoup, beaucoup de temps. Toute une vie en fait.

    - Mais… Cela peut être éprouvant pour des humains d’être si éloignés de leurs semblables… Cela va être difficile pour toi.

    - Eh bien… Je voulais vous en parler aussi ce soir. Je ne serais pas tout seul à faire ce voyage. Il y aura ma fiancée.

    Stéphan sortit une photographie de la poche de sa veste et la posa sur la table. Gabby et Raphaël se penchèrent vers elle. Il s’agissait de Stéphan et d’une ravissante jeune femme aux cheveux châtains coupés en carré, avec sur le nez une paire de lunette beige, qui souriait doucement devant l’objectif.

    Kepler-90

    Gabby releva la tête vers Stéphan et eut comme d’habitude des paroles pleines de gentillesse.

    - Eh bien… Même si je ne suis pas du tout ravie de la première nouvelle, je suis contente que tu sois accompagné par cette jeune femme. C’est dommage que nous n’ayons pas pu faire sa connaissance avant. Est-ce qu’on peut l’inviter ici ?

    - je suis désolé, Gabby, mais cela ne va pas être possible. Le temps est trop court. Je suis venu ici pour vous informer de mon départ et vous dire au revoir. Dans quatre jours, Je vais devoir me mettre en quarantaine pour préparer le voyage.

    Raphaël n’avait toujours rien dit. Il restait le regard fixé sur la photo, le front plissé par la concentration. Puis il releva lentement les yeux vers son frère.

    - Stéphan, comment s’appelle cette jeune femme ?

    - Annabelle… Raven…

    - Raven ?!!!

    Kepler-90

    Raphaël avait presque crié et Gabby sursauta. Stéphan ne broncha pas. Il s’était douté de la réaction de son frère et s’y était préparé.

    - Oui. Annabelle Raven. La fille de Terrence et Pattie Raven. Et la nièce d’Aliénor.

    - Bon sang !!!

    Raphaël se recula contre le dos de la chaise, la mine incrédule, ne voulant croire à ce qu’avait dit son frère. Il lui jeta un regard noir puis soudain, il se leva et sortit par la porte qui menait au jardin derrière la maison.

    Kepler-90

     

    Stéphan ne s’affola pas. Il reprit délicatement la photo et la rangea dans sa veste. Il eut un regard navré vers Gabby.

    - je suis désolé, Gabby, pour cela.

    - Ho Stéphan ! Entre toutes les femmes, il a fallu que tu tombes amoureuse de celle-ci…

    Kepler-90

    - Oui. Le destin est parfois bien étrange, n’est-ce pas ? Mais Annabelle est une Douée, tout comme moi. C’est donc normal que l’on se soit retrouvé dans la même académie. Quand j’ai appris son nom de famille, j’ai voulu l’éviter tu sais, mais…

    Il ouvrit les bras d’un geste fataliste, indiquant par-là, que parfois on ne maîtrisait pas toujours tout. Et qu’il était inutile de combattre contre ce qui était prévu d’avance. Gabby poussa un long soupir et prit la main de Stéphan, la serrant fortement.

    - Tu vas me manquer, tu vas beaucoup me manquer, mon petit Stéph’. Cela sera dur de ne plus te voir. Mais je suis contente et fière de te voir participer à cette grande aventure. Tu es si brillant !

    - Merci, Gabby.

    Il se pencha vers elle et l’enlaça tendrement. Oui, elle allait lui manquer à lui aussi, sa maman d’adoption. Elle lui embrassa la joue puis lui indiqua du regard la porte de derrière.

    - Allez, va lui parler. Vous avez des choses à vous dire et cela serait bête de vous quitter en étant fâchés.

    Stéphan opina en un bref sourire puis sortit de la maison.

    Kepler-90

    Raphaël était sorti du jardin et était descendu sur la plage, le regard fixé sur les vagues qui venaient mourir à ses pieds. Il se retourna quand il entendit Stéphan arriver à sa hauteur, mais il ne parla pas et il continua à fixer l’horizon, là où le soleil était en train de se coucher. Le jeune homme attendit. Raphaël poussa un coquillage de son pied, toussota un peu pour se donner une contenance et sortit enfin ce qui lui pesait sur le cœur.

    Kepler-90

    - Je suis jaloux de toi, tu sais ?

    - Jaloux ?

    Stéphan s’était retourné vers lui, étonné.

    - Oui, jaloux… Ton union avec cette petite Raven me remet en pleine face ce que je n’ai pu réaliser avec Aliénor.

    Raphaël se tourna vers lui, le visage amer vers son jeune frère, qui fut complètement interloqué.

    - Mais enfin, si je me souviens bien, c’est toi qui as quitté Aliénor. Toi qui as voulu arrêter toute relation avec elle.

    - Je le sais bien... Mais une fois que je suis parti de Mainland, une fois que nous sommes arrivés à vivoter plus ou moins bien à Edimbourg, je me suis rendu compte que je m’étais conduit comme un idiot. Un idiot insensible qui plus est. Si j’avais été un peu plus patient, nous aurions pu prendre un autre tournant dans notre relation, même sans enfant.

    Kepler-90

    - Mais tu n’aurais pas rencontré Gabby. Et Gabby tiens à toi… Et tu tiens à elle.

    - Oui… J’ai Gabby. Heureusement d’ailleurs. Je me serais perdu sans elle. Mais il y a une part de moi qui regrettera toujours cette ancienne relation car c’est une partie de mon passé…

    - … Et donc, tu vas toujours m’en vouloir d’être fiancé avec Annabelle ?

    Stéphan était légèrement sur la défensive. Il savait qu’en revenant ici, en dévoilant sa relation avec Annabelle, qu’il allait faire du mal, mais il espérait quand même ne pas repartir sur des ressentiments de part et d’autre. Son frère resta un long moment silencieux puis eut un bref rire sans joie. Il se tourna vers lui et l’enlaça rudement contre lui.

    Kepler-90

    - Non, Stéph’, je ne vais pas rester fâché. Cela serait idiot alors que dans quelques jours tu pars pour ne plus jamais revenir ici. Mais que tu vas me manquer, mon frère.

    - Moi aussi tu vas me manquer. J’essaierais de vous donner des nouvelles par les moyens que je disposerais là-bas.

    - Tâche de faire attention à toi, hein... Et puis... Qui sait, il y aura peut-être une prochaine génération Bassington, là-bas, dans les étoiles.

    - Peut-être…

    - Elle aurait été fière de toi, tu sais ?

    - Qui ça, Aliénor ?

    - Non. Emma…

    Raphaël tordit les lèvres pour éviter de se laisser submerger par l’émotion puis il tourna sa tête vers les étoiles qui venaient d’apparaître.

    Oui, Emma aurait été heureuse de ce pas en plus de pour l’Humanité, dans l’Espace. Et quelque part, c’était un peu grâce à elle, si tout cela était arrivé.

    Il laisserait partir son frère car c’était ainsi que cela devait se faire. Et lui, peut-être, qu’il arriverait à faire la paix avec son passé et, enfin, laisser les remords disparaître.

    Kepler-90

     

     

    FIN (…ou pas)


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  • L'Anomalie

    Le soleil était déjà haut dans le ciel quand Aliénor se réveilla enfin. Elle eut un grognement et se frotta le crâne, les tempes prisent dans un étau. Elle savait qu’elle n’aurait pas dû boire autant hier soir, cela n’était vraiment pas raisonnable. Elle en payait maintenant le prix. Mais plutôt avoir mal à la tête que de penser à Raphaël.

    L'Anomalie

    Elle eut derechef un grognement et plongea son visage dans l’oreiller. Elle sentait pourtant que le sommeil l’avait quitté et qu’il ne servait à rien de paresser plus longtemps. Elle repoussa les couvertures et tendit l’oreille. Aucun bruit à l’étage, ils devaient être tous descendus.

    Elle aurait bien aimé rester allongée toute la journée mais ce n’était pas une bonne idée. Qu’allait-elle donc bien faire de sa peau aujourd’hui ? Nath n’avait pas besoin d’elle pour le moment et au vu du peu de débit internet qui passait, il n’y avait pas besoin d’être deux à attendre des nouvelles. Quant à la cuisine, sa mère et Rowan s’en occupaient très bien. De toute façon, elle n’était pas spécialement attirée par les fourneaux. Et elle n’allait certainement pas aider son père. Celui-ci s’était donné comme mission de vérifier toute la plomberie et robinetterie du Domaine. Aliénor savait bien que c’était un dérivatif afin de ne pas penser à ce qu’ils avaient laissé en Amérique. Mais voilà. Fournir un effort auprès de son père actuellement était au-dessus de ses forces.

    L'Anomalie

    Aliénor resta allongée encore quelques minutes. Puis, d’un mouvement, elle se leva et alla dans la salle de bain. Une brève toilette de chat et elle descendit ensuite vers la cuisine. Karine Raven était aux fourneaux et une délicieuse odeur de pommes de terre frites se faisait sentir. Elle embrassa sa mère et reporta son regard sur le contenu de la poêle.

    L'Anomalie

    - Cela sent bon. C’est pour ce midi ?

    - Non. C’est pour ce soir, c’est pour accompagner le poisson que ton père a péché ce matin.

    - Ah ? Eh bien, il doit être content d’avoir pris ce poisson.

    - Si tu savais… Il n’arrête pas de s’en vanter.

    Karine leva les yeux au ciel dans un mouvement d’agacement puis elle reporta son regard vers sa fille.

    - Tu veux prendre ton petit déjeuner ? Je te sers un café ?

    - Oui, je veux bien, maman.

    Aliénor s’installa sur le canapé de la véranda et se laissa servir. Elle eut un sourire envers sa mère qui lui caressa brièvement l’épaule. Si la relation avec son père n’avait guère évolué ou à peine, celle avec sa mère s’était grandement améliorée. Il est vrai qu’elles avaient eu aussi une conversation nette et franche entre elle deux il y a de cela quelque temps. Aliénor savait qu’elle s’était toujours inquiétée pour elle, et même si elle avait eu des gestes ou des actions maladroites, c’était uniquement dans le désir de bien faire et de la protéger. Alors, certes, la situation actuelle inquiétait encore plus Karine et l’avenir de sa fille. Mais elle ne se permettait plus d’interférer dans la vie d’Aliénor. Ou très peu.

    La jeune femme but son café mais refusa d’une grimace les toasts que sa mère lui présentait. Après les excès de la veille, son estomac était quelque peu barbouillé. Elle laissa dériver son regard à travers les vitres de véranda, savourant le paysage de neige qui s’étalait devant ses yeux. Puis elle eut un sourire en voyant sa maman s’installer à côté d’elle avec son ouvrage de tricot. Depuis la naissance de Shanna, Karine s’était découvert une passion dans l’art de tricoter et n’en démordait plus.

    L'Anomalie

    - Qu’est-ce que tu es en train de tricoter, cette fois-ci ?

    - Un gilet et un bonnet pour le petit Louis. C’est Pattie qui me l’a demandé.

    Karine eut une brève moue attristée. Louis, le fils de Terry et Pattie, son deuxième petit enfant, avec Annabelle, était né l’année dernière mais elle n’avait guère eu l’occasion de le voir avec toutes les restrictions et complications de déplacement qu’il y avait eu ces derniers temps.

    L'Anomalie

    - Tu comptes lui envoyer par le service postal ? Je crois que cela fonctionne un petit peu mieux maintenant.

    - Non. Je vais lui remettre en main propre. Aux dernières nouvelles, le train à partir de Thurso jusqu’à Edimbourg circule de nouveau. Je pense que je partirais avec ton père, vers la fin du mois.

    Karine s’arrêta un instant de tricoter et reporta son attention vers sa fille.

    - Mais, dis-moi, est-ce que tu voudrais venir avec nous ? Terry et Pattie seraient heureux de te voir. Annabelle aussi. Elle m’a parlé de toi la dernière fois au téléphone.

    L'Anomalie

    Aliénor fut prise de cours et ne sut que répondre.

    - Heu… Je… je ne sais pas…

    - Allie… Je sais combien c’est compliqué en ce moment pour toi, avec la fin de ta relation avec Raphaël. Mais, du coup, il n’y a pas grand-chose qui te retient ici.

    - Nath pourrait avoir besoin de moi ici. Ou Rowan.

    - Cela ne serait que pour quelques jours, Allie. Et puis cela te ferait du bien aussi de sortir un peu de cet endroit. Tu ne vas quand même pas rester ici éternellement, enfin !

    Aliénor prit un air buté et Karine n’insista pas. Elle savait qu’il ne fallait pas la brusquer et qu’elle reviendrait d’elle-même sur le sujet sensible. Elle poursuivit son ouvrage dans un silence un peu gêné. Elle posa ses yeux sur le sac qui contenaient ses pelotes de laine et eut une petite exclamation.

    - ho ! J’ai failli oublier… Voudrais-tu bien me rendre un service, Allie ?

    - Il s’agit de quoi, maman ?

    - J’ai tricoté une écharpe pour une connaissance du village. Et j’ai complètement oublié de lui apporter la dernière fois. Est-ce que tu voudrais bien y aller à ma place ?

    - Heu…

    - Ce n’est vraiment pas très loin. Et cette personne est très gentille.

    - Bon, ok. Comment s’appelle-t-elle ?

    - Camille Onishi. Elle habite au bout de la rue qui mène aux jardins. Tu ne pourras pas te tromper, c’est la maison qui a un observatoire astronomique dans son jardin.

    - Un observatoire ? Mais qui est donc cette personne ?

    - Tu verras bien, Allie. Tiens, voilà le tricot. Tu vas pouvoir y aller.

    - Mais ? Maintenant ?

    - Mais oui. Cela te fera du bien de sortir un peu et de profiter de l’air vivifiant.

    - Tu parles. Cela caille tu veux dire.

    - Cela te fera du bien quand même. Allez, zou !

    Aliénor poussa un soupir, se leva et prit le paquet que lui tendait sa maman. Mais, finalement, elle n’était pas mécontente de sortir un peu du Domaine. Moins elle verrait Raphaël actuellement, mieux elle se porterait.

    Elle s’emmitoufla soigneusement puis sortit du manoir et prit la direction du village. Le chemin était assez long quand on y allait à pied. Elle aurait pu prendre la voiture mais elle tenait à économiser le carburant car celui-ci était en rationnement partout.

    L'Anomalie

    La neige tombait encore un peu, enveloppant le paysage d’un doux manteau blanc immaculé et silencieux. Aliénor aimait ce paysage et ce temps alors que pourtant, elle avait été habituée depuis toute petite à la chaleur de Newborn et de San José. Mais, dans ce climat froid et venteux, elle se trouvait comme purifiée et apaisée. Comme si le vent emmenait au loin tous les tracas qui lui plombaient le moral.

    Elle se retourna et vit la trace de ses pas dans la neige. Cela la fit sourire et elle s’amusa ensuite à faire des grands pas, pour la joie d’entendre la neige crisser sous ses pieds. Un plaisir qui la ravissait comme une enfant. Elle s’amusa ainsi un temps puis se remit à marcher normalement, le regard rivé sur le chemin. Et, alors, qu’elle passait à un endroit où la neige était bien plus épaisse et la marche un peu plus ardue, une pensée surgit, une pensée dérangeante, une de celle qu’elle avait au moins une fois par jour depuis qu’elle était partie de Newborn. Et cette pensée était évidemment focalisé sur lui. Cet être étrange qui l’avait laissé en vie. Elle s’arrêta un instant le temps de reprendre sa respiration qui s’était bloquée en pensant à Jay.

    L'Anomalie

    Il était facile de dire de ne pas y penser et pourtant, elle ne pouvait s’empêcher d’y revenir encore et encore. Si sa relation avec Raphaël n’avait pas fonctionné, elle savait que ce n’était pas que sa stérilité qui entrait en ligne de compte mais aussi cet…attachement qui la liait à Jay. Comment aurait-elle pu construire quoi que ce soit alors qu’il pourrait revenir la chercher à tout moment. Et, pensée encore plus dérangeante, qu’elle n’osait à peine se l’avouer, mais une partie d’elle-même attendait ce retour, inéluctablement. Elle se mordit les lèvres avec force, se faisant saigner et la douleur la fit revenir à elle. Allons, il était inutile d’y penser, viendrait ce qui viendrait. Et d’un mouvement d’épaule, comme si elle chassait ses pensées dérangeantes loin derrière elle, elle continua sa route jusqu’au village.

     Une fois arrivée dans le bourg, il lui fallut quelques minutes pour le traverser et arriver enfin devant la demeure que lui avait décrit sa maman. C’était une maison avec un étage, en pierres extraite de la région, comme les autres maisons du village. Mais, ce qui détonnait le plus, c’était de voir à l’arrière de la bâtisse, une construction ronde avec une coupole qui s’ouvrait sur le ciel. Un observatoire astronomique. C’était un détail curieux dans ce petit village isolé de Mainland et Aliénor se demandait pourquoi elle n’avait pas découvert cela plus tôt.  Mais, c’était peut-être parce qu’elle n’était guère sortie du Domaine depuis qu’elle était arrivée ici, évitant de se mêler à la population locale. En dehors de son cercle familial et amical, elle n’aimait toujours pas converser avec des inconnus.

    L'Anomalie

      Elle souffla un bon coup et sonna à la porte. Quelques instants plus tard, la personne qui habitait cette maison vint lui ouvrir. Aliénor eut un sursaut en la voyant. Au lieu de voir une européenne bien en chair et assez costaude, c’était une dame aux traits asiatiques et à la carrure frêle qui se tenait devant elle. Dame qui fronça légèrement les sourcils et la toisa d’un air interrogatif.

    L'Anomalie

      - Humm, bonjour. Je me nomme Aliénor Raven. Je suis la fille de Karine Raven. Celle-ci vous a tricoté une écharpe et je viens vous l’apporter.

      Aliénor sortit l’écharpe de son sac et la tendit vers la vieille dame. Celle-ci écarquilla les yeux puis eut un sourire envers la jeune femme.

      - Ha mais oui ! C’est gentil de la part de votre maman, je ne pensais pas qu’elle me prendrait au mot. Mais entrez donc, ne restez pas dans le froid.

      Aliénor entra à sa suite et découvrit un intérieur assez épuré. Il n’y avait pas beaucoup de meubles mais ils étaient cossus et confortables. Au mur, étaient accroché une multitude de photographies de planètes et galaxies, avec une prédominance pour la planète géante, Jupiter. Aliénor restait scotchée dessus et son hôte s’en aperçut. Elle eut alors un léger rire.

    L'Anomalie

      - C’est vrai que cela surprend la première fois. C’est une légère déformation professionnelle de ma part et en même temps, je trouve tous ces objets célestes tellement beaux… Mais pardon, quelle sotte je suis, je ne me suis même pas présentée. Camille Onishi, astrophysicienne à la retraite.

     - Ho ! Enchantée.

     Elles se serrèrent la main et Aliénor sentit toute la fermeté de Camille dans sa poignée. Une foule de questions se bousculaient dans son esprit mais une seule franchit ses lèvres.

      - C’est donc vous qui avez installé l’observatoire astronomique dans votre jardin ?

      Camille haussa un sourcil puis elle eut un sourire sibyllin.

      - On pourrait le croire, en effet, au vu de mon ancien métier. Mais en fait, non. C’est l’ancien propriétaire de cette maison qui l’a fait construire. Mais c’est cette particularité qui m’a fait l’acheter. Et cela tombe bien car je m’en sers toujours. Mais asseyez-vous donc, je vais vous préparer du thé… Vous buvez bien du thé ?

     - … Oui, oui, bien sûr.

     Aliénor n’avait pas trop envie de boire quoi que ce soit, mais elle voulait rester encore un peu ici et découvrir qui était cette intrigante Camille. Celle-ci revint avec deux tasses fumantes qu’elle déposa sur la table basse et ensuite, elle vint s’asseoir à côté d’Aliénor. Elle resta un instant le regard fixé sur une photographie de Jupiter puis elle se retourna vers elle, lui prêtant toute son attention.

      - Karine, votre maman, m’a dit que vous étiez informaticienne, c’est cela ?

     - Humm, oui… Ingénieur en système réseaux et autres joyeusetés. Enfin, ça c’était quand j’avais encore un travail aux Etats-Unis et que ceux-ci existaient toujours…

    - … Quelle tragédie ce qu’il vient de se passer. Et dire que peu de pays sont intervenus pour aider ces pauvres gens. Tant de morts et de destructions. Tout cela à cause d’une Intelligence Artificielle de l’armée qui serait devenue folle… Cela serait donc vrai ?

    - … C’est ce qu’il se dit…. Ma famille, mes amis et moi sommes partis quand nous vu que les destructions s’approchaient trop près de notre ville. Nous n’avons pas vraiment cherché à savoir qui était derrière tout ça, humain ou machine, on tenait juste à ne pas être tués.

    - Et vous avez bien fait. Les cimetières sont remplis de gens qui cherchaient à jouer aux héros. Il faut laisser la guerre à ceux qui savent la faire.

    L'Anomalie

     Camille posait un regard plein de sollicitude et de compassion sur elle. Aliénor prit sa tasse de thé et en but une gorgée. C’était principalement pour éviter de laisser paraitre la moindre émotion face à ce qu’elle venait de dire et éviter de lui révéler ce qui c’était vraiment passé. Elle avait toujours été une piètre menteuse et c’était difficile de raconter « la petite histoire » qu’ils avaient montés quand ils étaient arrivés sur l’île de Mainland, après leur départ des USA. C’était bien évidemment pour se protéger et la protéger, elle, de toute suspicion quant à leur rôle dans tous les évènements arrivés là-bas.

     Elle reposa sa tasse et releva les yeux sur sa voisine.

     - Et donc, moi qui étais ingénieur en informatique, me voilà à faire le coursier pour ma mère pendant qu’elle et mon père font tourner la maison. Il n’y a guère de travail ici pour moi et du coup, je me sens très désœuvrée, alors que je devrais m’estimer heureuse…

    L'Anomalie

     - Je comprends votre ressenti. J’aurais du mal moi aussi à ne rien faire. Et je suis assez chanceuse, finalement, car malgré ma retraite, je suis toujours active.

    - Ho, vraiment ?

    - Oui… Comme il n’y a plus d’observatoires aux USA… Certaines études ont été répercutées sur d’autres observatoires par le monde. Je sous- traite des données que l’Observatoire Royal de Londres m’envoie.

    - Et que traitez-vous si ce n’est pas trop indiscret ?

    - Je recueille toutes les informations que nous envoie la sonde Europa Clipper en orbite autour d’Europe, un des satellites de Jupiter.

    - Ho ? Celle-ci ? Celle qui devait découvrir s’il y avait de la vie dans ses océans ?  Elle est toujours en activité ?

    - Hé oui, c’est une vieille machine. Elle a été lancée en 2024 mais n’est arrivée en orbite autour d’Europe qu’en 2030 *. Et depuis, elle fonctionne toujours. Même si on a un peu modifié son but initial. Car oui, on a découvert quelques traces de vie dans ces océans sous la glace. Mais on a surtout découvert qu’Europe contenait beaucoup de terres rares, ces métaux si précieux et dont nous avons désespérément besoin dans nos industries… Du coup, je recense les endroits où il y a le plus de concentrations de terres rares, pour peut-être un jour, être extrait, quand les choses se seront calmées ici sur Terre et que les nations pointeront de nouveau leur regard sur l’espace …

    L'Anomalie

    - Eh bien, je ne m’attendais pas à ce que l’industrie humaine veuille étendre sa production aussi loin …

    - Oui, c’est très prosaïque et bien loin de l’imaginaire émerveillé du citoyen lambda. Et pourtant, parfois on a encore des sources d’étonnement. C’est ce que m’a fait vivre la sonde dernièrement.

    - Ah bon ? C’est-à-dire ?

    - Venez, je vais vous montrer.

     Camille se leva du canapé et l’invita à la suivre dans la pièce qui se trouvait derrière elle. Il s’agissait de son bureau où se trouvaient plusieurs ordinateurs et instruments de mesures, mais aussi beaucoup de papiers en piles, posés à même le sol ou en tas sur le bureau. La vieille femme lui désigna un fauteuil où Aliénor pris place pendant qu’elle-même s’installait devant l’ordinateur. Elle fit pivoter l’écran vers elle et lui montra une succession d’images où on voyait des sortes de grandes protubérances sur un sol craquelé.

      - Heu… Je dois voir quoi, Camille ? Vous pouvez m’éclairer ?

     - Ha, pardon. Je suis tellement habituée à parler à des personnes qui sont plongés dans les mêmes études que moi que j’en oublie que tout le monde n’a pas la même connaissance là-dessus. En fait, sur ces images, j’ai capturé un étrange phénomène qui s’est crée sur l’un des pôles d’Europe. Des sortes de… bosses.

    L'Anomalie

    - Des bosses ?

    - Oui, je n’ai pas d’autres termes. Et je ne sais pas si ce phénomène est normal ou pas. Si cela est déjà arrivé dans le passé. J’ai déjà eu de la chance de pouvoir le prendre en photo avec la sonde car une semaine après, il n’y avait plus rien. Et cela ne s’est pas reproduit jusqu’à maintenant.

    - Est-ce que cela serait possible une activité volcanique ?

    - Possible… Mais on aurait vu d’autres traces… Du coup, je ne suis pas plus avancée mais je vais quand même continuer à regarder, sait-on jamais...

    - Et vous avez envoyé vos rapports à L’observatoire de Londres ? Qu’est-ce qu’ils ont dit, eux ?

    - Pfff ! Comme d’habitude, « surveilles et reviens vers nous si cela se reproduit ». En bref, c’est débrouilles-toi et ne nous casses pas trop les pieds. Mais bon, ce n’est pas comme si leurs comportements m’étonnaient…

    L'Anomalie

    - Eh bien…

    - Ho, cela ne m’attriste pas, au contraire, vous savez. J’aime bien pouvoir faire mes observations sans obligatoirement avoir quelqu’un sur le dos.

    - Vous savez que je vous envie ? C’est un travail qui m’a toujours fasciné.

     Camille se tut et la regarda par en-dessous, l’air de soupeser mentalement une décision.

      - Cela vous dirait de me donner un coup de main ? Cela vous permettrait d’être moins désœuvrée. Et moi, je pourrais me focaliser sur d’autres données annexes.

    L'Anomalie

      Aliénor ne sut comment prendre la proposition de Camille et haussa un sourcil, perplexe.

      - Vous êtes sûre ? Vous savez, je suis très novice dans le domaine de l’astrophysique, même si cela m’intéresse beaucoup à titre personnel.

     - Mais oui, je suis sûre, sinon je ne vous l’aurais pas proposé. Votre mère m’a parlé un peu de votre parcours. Vous êtes une douée. Cela ne devrait pas vous être trop difficile d’apprendre certains calculs. Et moi, cela me rappellera les années où je m’occupais des stagiaires.

     Après une brève réflexion, Aliénor accepta donc et ce fut acté entre elles. Dès demain, elle viendrait la voir pour l’assister dans ses observations. La jeune femme repartit l’esprit bien plus léger au Domaine.

      Le soir-même, ne pouvant souffrir d’être dans la même pièce que Raphaël, Aliénor se réfugia dans la bibliothèque et se retrouva nez à nez avec Stéphan, le petit frère. Celui-ci était plongé dans un livre. En la voyant, il lui offrit un pauvre petit sourire tremblant. 

    L'Anomalie

    Stéphan… Le frère de Raphaël mais aussi celui d’Emma. Né bien après sa mort, pour la remplacer, car Haut-potentiel lui aussi. Mais actuellement, c’était un enfant de 6 ans qui avait perdu ses parents et qui avait du mal à s’adapter à ce nouvel environnement. Et pourtant, Raphaël se mettait en quatre pour lui. Aliénor, quant à elle, essayait de lui apporter un peu de douceur et de légèreté, autant qu’elle le pouvait. Elle posa une main légère et caressante sur sa tête puis se positionna devant un rayonnage, ne sachant si elle avait envie de lire ou pas. Et puis son regard dériva vers le bas de la bibliothèque et un gros livre traitant de l’astronomie attira son regard. C’était tout à fait ce qu’il lui fallait après sa rencontre de l’après-midi. Elle le sortit et s’installa sur un canapé pour le feuilleter. Elle s’arrêta sur la planète Jupiter et ses satellites. Elle voulait en savoir plus sur le satellite Europe afin d’être un peu plus informée quand elle irait retrouver Camille Onishi.

    L'Anomalie

    Elle était plongée dans sa lecture quand elle sentit soudain une petite main sur son bras.

     - Qu’est-ce que c’est que ces planètes ? 

     Stéphan lui montrait du doigt l’illustration de la page qu’elle regardait. Aliénor se tourna vers lui. 

     - Ce ne sont pas vraiment des planètes mais des lunes. Enfin, des satellites. Ils appartiennent à la planète géante, Jupiter. 

    - C’est intéressant. Est-ce que je peux regarder avec toi ?

    - Si tu veux, Stéphan.

     Le petit garçon se blottit contre elle et il l’écouta lui lire le paragraphe sur le système jovien comprenant ses 79 satellites. Elle se rendit compte rapidement qu’il comprenait vite ce qu’elle lui lisait et qu’il avait l’air fortement intéressé par l’astronomie. Une idée germa en elle. 

     - Dis-moi, Stéphan, est-ce que cela t’intéresserait d’observer les étoiles et les planètes ? 

    - Ho oui. On pourrait voir Jupiter ?

    - bien sûr. Demain, je dois retourner chez la dame du village qui a un observatoire astronomique. Tu pourrais venir avec moi. Je suis sûre qu’elle acceptera de te laisser regarder un peu.

    - Cela serait chouette, oui.

     Stéphan avait les yeux brillants de plaisir. Il y avait enfin quelque chose qui retenait son intérêt et qui l’enthousiasmait, comme l’enfant qu’il était. Aliénor sourit et le serra tendrement contre elle. 

    L'Anomalie

     Le lendemain, elle tint parole et l’emmena avec elle chez Camille Onishi, qu’elle avait préalablement prévenu avant. Celle-ci se montra très réceptive face à la curiosité de Stéphan et se montra même une fine pédagogue pour lui expliquer son métier mais aussi tout ce qui avait trait au cosmos et à la mécanique céleste. Stéphan, fidèle à ce qu’il était, se révéla un élève assidu, curieux et avec une mémoire impressionnante. Et, tout le temps qu’il passa avec les deux femmes, il se montra appliqué et consciencieux malgré son jeune âge. Le garçon avait trouvé un domaine qui lui plaisait et qui le suivrait toute sa vie. 

    L'Anomalie

     Mais toutes les bonnes choses avaient une fin. Raphaël, après plusieurs semaines de recherche, trouva enfin des places dans le prochain ferry qui les emmènerait sur le continent... Stéphan en fut fort dépité et fort déçu. Pour autant, il lui fallait bien suivre son frère puisqu’il était maintenant sa seule famille. Bientôt, Il oublierait le temps qu’il avait passé sur l’île de Mainland mais pas sa nouvelle passion sur l’astronomie. 

     Quant à Aliénor, elle ne le savait pas encore, mais son prochain voyage à Belfast l’amènerait à résoudre le mystère du satellite Europe…

    L'Anomalie

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    *La sonde Europa Clipper est actuellement en fabrication. Elle devrait être lancée en 2022 ou 2023. Sa mission : chercher des traces de vie sur Europe, un des quatre satellites galiléens de Jupiter (source : Futura-Sciences.com).

     

    ********************

    Camille Onishi est une création de GGO. Je la remercie pour sa création, que j'ai quelque peu vieilli :) . Vous pouvez trouver l'original sur la galerie avec l'ID Origin : GGOf19. 

     

     

     


    10 commentaires
  • J'ai tenté une expérience et j'ai vieilli Shanna, la fille de Nathanael et Rowan. Je la trouve assez sympathique en adolescente. (elle aura peut-être une nouvelle, elle aussi. Mais chut, ce n'est encore qu'à l'état embryonnaire ^^).

     

    Et, cette personne, saurez-vous devinez qui elle est ? On reste toujours dans l'univers de Singularité !

     

    Oui, je me suis un peu amusée ce week-end dans ma partie he.

     


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  • Nathanael s'est remis à la peinture. Mais je pense qu'il peut faire mieux que ça quand même sarcastic. Ou alors, il se fiche de moi, ce qui est bien possible !

    InstantanésSingularité - 4

     

    Rowan, qui aime faire comme son compagnon, s'est mise elle aussi à la peinture. Bon, là, pour elle, c'est tout à fait son niveau he. (en vrai, c'était une action autonome de sa part. Un appel du pied peut-être ? ^^)

    InstantanésSingularité - 4

     

    Et puis, parce que j'adore la regarder faire du yoga : Aliénor en pleine séance !

    InstantanésSingularité - 4

     

     

     

     


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