Le voyage jusqu’à Sulani s’effectua en deux temps. Elles décollèrent de Mont Komorebi pour faire une escale à l’aéroport de Newcrest. Cette pause était bienvenue pour Shimizu car elle était déjà fatiguée d’avoir passé quelques heures dans l’avion.

Elle apprécia avec gratitude le verre de jus d’orange que lui tendit Akari. La vieille femme s’assit ensuite à côté d’elle et eut un petit soupir de contentement. Elle se tourna vers Shimizu et eut un petit rire.

- Tu vois, Shimizu, même si je déplore ta maladie, elle me permet quand même de retourner à Sulani, l’endroit que j’aime plus que tout au monde. La vie nous réserve bien des surprises.

- Vous avez longtemps travaillé à Sulani, Akari ?

- Beaucoup dans ma jeunesse, oui. C’était ma première expédition et je travaillais avec Joseph Thompson, l’océanologue en chef. Mais ensuite, mes travaux de recherche m’ont fait dériver vers des contrées plus froides et je ne suis jamais revenue à Sulani… C’est ainsi. Et, en même temps, je ne regrette pas mes choix de carrière. Car, vois-tu, Joseph était un très bel homme étant jeune et nous étions plusieurs collègues à lui tourner autour. Mais, lui, il est tombé amoureux d’une habitante de Sulani et s’est marié avec elle. Je ne pouvais pas supporter cela. Alors, il valait mieux que je parte.

Shimizu fut un peu sidérée et mal à l’aise face à la confidence de sa vieille voisine.

- Ho ! … Je… Est-ce que cela ne va pas vous faire plus de peine de revoir ce monsieur ?

- J’étais jeune, Shimizu. J’ai vieilli et muri. Et puis, j’ai eu d’autres amours… Le plus important, finalement, dans tout ceci, c’est que Joseph m’a gardé son amitié. Et cela, c’est bien plus précieux qu’une petite amourette d’une jeune femme qui ne connaissait rien à l’amour. Et puis c’est cette amitié qui te permet de voyager jusqu’à Sulani. La vie est bien faite. 

Akari eut un grand sourire envers sa compagne de voyage puis elle ouvrit un livre et se plongea dans sa lecture. Shimizu reporta son regard sur son verre désormais vide.

Ce voyage lui permettait de connaître un peu plus Akari. Et elle s’avérait bien plus complexe qu’elle ne l’avait pensé de prime abord. Elle s’autorisa un petit sourire. Sa maladie était certes très malvenue mais elle lui avait permis de s’apercevoir qu’elle avait de l’importance pour quelques personnes, et ça, c’était très remarquable pour elle. Et puis, elle allait se reposer dans un endroit idyllique, avec une voisine attachante. Peut-être que sa vie allait finalement prendre un nouveau départ.

L’escale se termina et elles remontèrent dans l’avion. Shimizu dormit jusqu’à l’arrivée à Sulani.

Le vol et l’atterrissage s’était passé de nuit, il n’y avait donc pas grand-chose à voir. Mais la première chose qui marqua Shimizu en descendant de l’avion, ce furent les odeurs. Une odeur iodée tout d’abord puis une odeur de fleurs et de végétations. C’étaient des parfums très fort et presque grisant. La jeune femme s’en délecta. Et puis, alors qu’elles étaient transportées en voiturette jusqu’à leur destination, ce fut le son qui envahit les oreilles de Shimizu. Le bruit des vagues, le long roulement de l’eau contre la roche et son retrait. Elle se retourna vers Akari qui eut un petit sourire en coin.

- Tu verras que c’est encore plus beau à la lumière du jour, Shimizu. Et tu ne pourras plus t’en passer. Enfin, moi, c’est toujours ce que j’ai ressentis.

Et en effet, Shimizu voyait qu’Akari n’était plus la même depuis qu’elles avaient posé les pieds sur le sol de Sulani. La vieille femme était bien plus enjouée et alerte qu’à Mont Komorebi. Et cette énergie qui se dégageait d’elle la mettait également en joie.

Les deux femmes arrivèrent enfin à leur destination, l’hôtel Ohan’ali. Un membre de la famille Thompson viendrait les chercher demain pour les emmener dans le quartier de Lani Saint Taz, là où ils habitaient et là où se reposerait Shimizu.

Mais le lendemain, la jeune femme fut surprise de ne pas voir Akari à ses côtés dans la salle du petit déjeuner. Une personne de l’hôtel vint lui apporter une lettre. Lettre qui était signée d’Akari.

« Ma chère Shimizu,

Je suis désolée de partir ainsi à la sauvette mais je viens de retrouver un vieux collègue de travail, là dans cet hôtel. Et il me propose une petite croisière à travers l’archipel de Sulani et les îles environnantes. C’est une offre que je ne peux refuser, tu le comprendras bien. Je sais que je te laisse entre de bonnes mains avec la famille Thompson. On se revoit dans trois mois pour notre retour. Profite bien de ton séjour ici. A bientôt. Akari »

- Ha ben ça ! C’est trop fort !

Shimizu était tellement estomaquée qu’elle avait parlé à haute voix. Pour elle, le devoir passait avant toute chose, avant tout plaisir. Elle ne comprenait donc pas trop et était même choquée par l’abandon d’Akari. Il lui fallut quelques instants pour se remettre. Elle comprit qu’il fallait donc en prendre son parti et accepter cette nouvelle situation.

Elle finit de prendre son petit déjeuner puis attendit à la réception que quelqu’un veuille bien venir la chercher.

Ce fut un jeune homme athlétique et à la peau caramel qui vint vers elle et lui adressa un grand sourire.

- Bonjour, êtes-vous Shimizu Oniri ? Enchanté, je suis Moé Thompson et c’est moi qui vais m’occuper de vous pendant votre séjour.

Note de l'auteur : L'aéroport et l'hôtel sont de Meliaone. Et Moé Thompson est un personnage de Soorane, Matahi Mahine (que j'ai quelque peu relooké ).